Aux fleurs plus de couleur, plus de vitesse à l’onde (1992)

pour flûte, clarinette, piano, violon et violoncelle (10′)
Création le 13/12/92 à Paris (Grand Palais) par Cécile Daroux, Loïc Loisel, Hugues Leclere, Pascale Villette et Blandine Terrieux, direction de Philippe de Chalendar
Nombreuses exécutions en France, Pologne, Italie, Grande Bretagne…

éditions Jobert

CD RUS 555061.2 Chromas Ensemble, direction Adriano Martinolli
CD LI 13-0901, Atelier Musical de Touraine

Très « logique » dans sa construction, cette pièce étale en quintette – peut-être la plus parfaite formellement du catalogue lemaîtrien – séduit par la sensation de « pré-écoute » qu’elle offre (plus exactement par la réalisation sonore de ce qui avait été pressenti) (…)

De toute évidence, une sensation d’équilibre s’en dégage, autour de la cadence de piano, à la fois synthèse de ce qui précède et embryon de la matière sonore qui va éclore pour finalement se perdre dans le silence.

Pour le site internet consacré à Dominique Lemaître, Nathalie Dumesnil écrit que « les quatre instruments mélodiques qui se relayent autour d’un Do5 ouvrent l’œuvre de façon énigmatique. Les timbres fusionnent, se transforment très progressivement et pourraient évoquer certains passages des Quatre pièces sur une seule note du maître Scelsi ; ce pôle se mue soudain en mélismes descendants évoluant vers un épisode statique. Le piano apparaît, insistant mais peu disert, distribuant quelques hauteurs comme des amers et ses interventions, constituées de notes isolées et résonantes, sont colorées par le quatuor mélodique à la manière d’une Klangfarbenmelodie. Le halo qui en résulte s’enrichit de modes de jeux progressifs (fondu-enchaînés, variations subtiles de vibrato, déplacements d’archet sul tasto à sul ponticello, tenues en crescendo – decrescendo, trilles, harmoniques…) dans une plastique sonore fine et ténue. Au milieu de la pièce, le piano s’émancipe, devient plus prolixe pour amorcer une cadence en contrepoint, esquivant les appuis métriques et favorisant les intervalles de secondes, septièmes et quartes. Échouée dans le registre grave, elle invite le violoncelle puis la clarinette, se répète, génère le retour du violon et de la flûte, se fige… avant de disparaître. Le quatuor mélodique ondule, s’élève puis s’évapore. Poétique et évanescente, cette œuvre inspirée de phénomènes naturels, évolue, immatérielle, dans un temps suspendu à la frontière du rêve et de la réalité.

Pierre Albert Castanet